libellés

lundi 27 décembre 2010

Libération.fr : Marseille, la justice enquête

Société 23/12/2010 à 00h00

Flash-ball : la justice enquête à Marseille

Police. Une information judiciaire est ouverte après un premier décès. D’autres procédures sont en cours.
 
Par JÉRÉMY MARILLIER
 
Lundi, une information contre X a été ouverte par le parquet de Marseille après la mort de Mostefa Ziani, 43 ans, décédé le 13 décembre, au lendemain d’un tir de flash-ball. Le policier qui lui a tiré dessus intervenait après un coup de couteau porté par Mostefa Ziani à un voisin dans le foyer de travailleurs de Marseille où il résidait.

Distance minimale. Selon les conclusions partielles de l’autopsie, la mort a été provoquée par le tir de flash-ball. L’information judiciaire, ouverte pour «homicide involontaire», devra rechercher s’il y a d’autres causes possibles, éventuellement liées à l’état de santé de la victime. L’enquête devra aussi expliciter les circonstances du tir, notamment le respect de la distance minimale pour l’utilisation du flash-ball, alors que l’action se déroulait dans une chambre exiguë.
Cette première victime, directe ou indirecte, relance le débat sur l’utilisation du flash-ball. Selon Me Irène Terrel, avocate de Joachim Gatti, qui a perdu un œil à la suite d’un tir en juillet 2009 à Montreuil (Seine-Saint-Denis), «la plupart des balles utilisées arrivent entre l’épaule et la tête. Etrange pour une arme non létale, qui doit être utilisée en dessous de l’épaule pour maîtriser l’individu. Le jour où l’on a tiré sur mon client, il y a eu six victimes. Six tirs, six au-dessus de l’épaule.»
Pour cette affaire, un policier de la brigade anticriminalité a été mis en examen pour «violences par personne dépositaire de l’ordre public». Deux policiers ont également été mis en examen ces dernières semaines pour le même motif et plusieurs autres pourraient l’être prochainement pour «non-assistance à personne en danger», selon Me Terrel.
Depuis 2006, quatre autres personnes ont perdu l’usage d’un œil à la suite d’un tir mal ciblé, comme Pierre, un lycéen de 17 ans, à Nantes en 2007. L’auteur de ce tir doit comparaître en justice le mois prochain. Geoffrey Tidjani (en octobre, à Montreuil) et Joan Celsis (en novembre 2009, à Toulouse) ont eux aussi perdu un œil. «Un juge d’instruction de Bobigny a été nommé, mais le policier qui a tiré n’a pas encore été auditionné», indique Me Jean-Pierre Mignard, avocat de Geoffrey. «L’instruction est en cours, mais notre demande de reconstitution de la scène a été refusée, regrette Me Pascal Nakache, avocat de Joan. Nous allons donc faire appel pour que toute la lumière soit faite.»

«Instructions». Joan Celsis a décidé de saisir la Commission nationale de déontologie de la sécurité, autorité surveillant les activités policières et plutôt hostile à l’utilisation du flash-ball. «Les instructions sont claires : nous devons utiliser le flash-ball si nécessaire, explique un délégué du Snop, syndicat de police. Je veux bien entendre les questions de morale, mais il faut choisir entre l’arme à feu et le flash-ball pour nous défendre. Le temps des policiers à bicyclette est terminé, la violence est de plus en plus présente dans les interventions. Qui a mieux à proposer ?»