Objet
Communication policière sur les violences du 27 novembre 2008 :
Approximations, erreurs, mensonges, diffusion de fausses nouvelles et impasses
Conséquences pratiques pour l’enquête judiciaire
Demandes de rectification au Journal Officiel
Nantes, le 27 novembre 2008
À Monsieur le Premier Ministre
À Madame la Ministre de l’Intérieur
À Monsieur le Préfet de Loire-Atlantique et des Pays de la Loire
À Monsieur le Recteur de l’Académie de Nantes
copie aux juges d’instruction chargés de l’affaire du 27 novembre 2008
copie à la CNDS
copie aux députés et sénateurs concernés
Lors de la manifestation étudiante et lycéenne du 27 novembre 2007, notre fils, alors lycéen mineur, a été grièvement blessé par un tir policier, sur la voie publique, devant le Rectorat de Nantes. Deux procédures ont été diligentées sur ces faits de violence policière : d’une part une enquête administrative de l’IGPN, Inspection Générale de la Police Nationale, à la demande du Procureur de Nantes dès le lendemain des faits, enquête aujourd’hui close et qui, de son aveu même, échoue et renonce à établir la vérité, d’autre part une enquête de la CNDS, Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité, laquelle vient de rendre ses avis et conclusions le 20 octobre dernier. La CNDS établit une longue liste de défaillances de l’institution policière suivies de recommandations, qui mettent en évidence le caractère tout à fait anormal des faits survenus le 27 novembre devant les grilles fermées du rectorat de Nantes.
Grâce au soutien actif de nombreux citoyens et des organisations syndicales du département, de plusieurs députés et sénateurs de Loire-Atlantique - Messieurs Dominique Raimbourg, François de Rugy, François Autain et Madame Marie-Odile Bouillé - une troisième procédure est en cours depuis le 10 juillet dernier, avec la nomination de deux juges d’instruction nantais et l’ouverture d’une information judiciaire contre X sous le chef de coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieur à 8 jours, avec la circonstance que les faits ont été commis avec armes et par une personne dépositaire de l’autorité publique. Dans ce nouveau développement de l’enquête sur les violences du 27 novembre 2007, qui ont blessé notre fils, mais également d’autres manifestants, nous sommes accompagnés par nos deux avocats, Maître Franck Boëzec à Nantes et Maître Nathalie Senyk à Paris.
Un an après, et compte-tenu des éléments nouveaux apportés par les enquêtes IGPN et CNDS, ainsi que les sources citoyennes [groupe de travail 27 novembre, organisations syndicales et section nantaise de la Ligue des Droits de l’Homme], nous souhaitons revenir sur les différentes éléments de la communication policière depuis les premiers jours : ses approximations, ses dénégations, ses mensonges, contre les faits et contre la réputation des personnes.
La police nationale a communiqué de trois manières différentes sur cette affaire :
- À chaud, dans les jours qui ont suivi la manifestation, auprès de la presse locale, en complément des communiqués de la Préfecture et du Rectorat. Nous avons étudié la revue de presse et mis en ligne une synthèse de celle-ci, nous constatons que les propos policiers varient, nient, dénigrent et justifient des faits eux-mêmes flottants, dans une communication à la fois mal maîtrisée et très agressive.
Le détail de cette analyse est consultable sur le site http://27novembre2007.blogspot.com
- Début 2008, en réponse à des lettres des citoyens nantais qui avaient écrit au Premier Ministre, François Fillon, pour protester contre les violences et les gardes vues punitives du 27 novembre 2007, deux policiers ont rédigé des courriers. Yves Monard, Contrôleur Général de la Police Nationale, Directeur Départemental de la Sécurité Publique de Loire-Atlantique le 3 mars 2008, et Éric le Douaron, Directeur des services actifs de la Police Nationale, chargé de la Direction centrale de la sécurité publique au Ministère de l’Intérieur, le 29 février 2008.
Si le courrier d’Yves Monard, responsable départemental, apparaît approximatif, il présente aussi un caractère diffamatoire en affirmant un élément nominatif totalement absent de l’enquête IGPN, enquête dans laquelle il est pourtant interrogé à plusieurs reprises.
Le courrier d’Éric le Douaron, responsable national au Ministère de l’Intérieur, fait l’objet d’une sévère mise en cause par la CNDS : « devant l’extrême gravité de ces blessures, dont les séquelles prévisibles sont particulièrement invalidantes puisque M. P.D-L. ne récupérera jamais sa vision de l’œil droit, la Commission déplore l’imprudente précipitation, dénotant en outre un manque de suivi patent du dossier du directeur central de la sécurité publique, qui, dans une lettre du 29 février 2008, a écrit de manière péremptoire « qu’en aucun cas [M. P.D-L.] n’a perdu l’usage de son œil, étant seulement touché à l’arcade sourcilière », alors que trois mois après les faits, la nature de la blessure de M. P.D-L., était notoirement connue, puisque deux certificats médicaux en date des 28 novembre 2007 et 21 février 2008 faisaient déjà état d’une atteinte traumatique de l’œil droit, de son segment antérieur et surtout de sa pupille. »
Ces deux courriers sont consultables sur le site http://27novembre2007.blogspot.com
- En septembre et novembre 2009, en réponse à trois questions écrites de Messieurs les Députés de Loire-Atlantique, Dominique Raimbourg et François de Rugy, questions publiées au Journal Officiel respectivement le 8 et le 15 juillet 2008, pages 5820 et 6073. Bien que les deux premières questions écrites ne portent pas sur les mêmes éléments, Madame la Ministre de l’Intérieur, de l’Outre-Mer et des collectivités territoriales produit une seule et même réponse, publiée donc deux fois le 16 septembre 2008, page 8052 et 8053 du Journal Officiel. La réponse de la Ministre, qui commence par un bref exposé des nouvelles conceptions du maintien de l’ordre appuyées sur de nouvelles armes, se termine par une accumulation de contre-vérités et de mensonges grossiers, que la lecture du rapport d’enquête IGPN, des avis et recommandations de la CNDS, de la presse locale ou nationale, du dossier d’enquête citoyen et des témoignages recueillis par la LDH remis aux enquêteurs et aux juges d’instruction, infirme totalement et définitivement.
La Ministre de l’Intérieur justifie d’abord l’action policière par l’envahissement des locaux du rectorat, de graves dégradations et des menaces pour la sécurité des personnes. Ces trois affirmations totalement mensongères, sont, pourrait-on ajouter, écrites en dépit même des éléments fournis par la police. La Ministre affirme ensuite qu’il y a eu des violences graves commises contre les policiers. Cette affirmation est également mensongère et absente de tous les éléments liés à l’enquête.
Dans sa réponse à la troisième question écrite, portant plus précisément sur le droit de manifester des mineurs et les préconisations policières relative à la protection des mineurs en manifestation, réponse publiée au JO le 18 novembre 2008, page 9984, la Ministre réitère des affirmations sans aucun rapport avec les éléments de l’enquête : une cinquantaine d'individus s'en prirent violemment aux policiers, dont dix furent blessés. L'interpellation des fauteurs de trouble et auteurs de violences était décidée.
Les questions écrites des députés nantais et les réponses de la Ministre de l’Intérieur sont consultables sur le site http://27novembre2007.blogspot.com
Au delà de la communication à chaud, des courriers subalternes, mensonger ou diffamatoire, nous nous étonnons que la Ministre de l’Intérieur en personne, manifestement mal informée et mal entourée, puisse participer à la diffusion de fausses nouvelles au sein même de l’Assemblée Nationale et du Journal Officiel, contredisant les données élémentaires de l’enquête policière.
Tous ces éléments traduisent, à notre sens, l’inquiétante dérive de l’institution policière en matière de communication externe, vis-à-vis des citoyens, des élus et des médias, d’un climat agressif et manipulateur,
En ce qui nous concerne, nous tirons deux enseignements de cet état calamiteux de la communication policière, en France, en 2008, dans une affaire de violences sur des jeunes manifestant-e-s pacifiques, dont de nombreux mineur-e-s.
Concernant la suite de la procédure judiciaire elle-même
Il nous apparaît impossible que la suite de l’enquête soit confiée à la police nantaise. Au vu de sa communication récente comme d’antécédents récents en cette matière [affaire du policier tué par un collège au commissariat central en octobre 2004, affaire de la disparition de Taoufik El Amri en novembre 2006], il apparaît que la police nantaise ne peut valablement enquêter sur elle-même.
Nous demandons à ce que les services de gendarmerie soient chargés des éléments d’enquête décidés par les deux juges d’instruction.
Concernant la rectification des écrits mensongers ou diffamatoires
Il nous apparaît qu’il est totalement anormal que des écrits mensonger ou diffamatoire émanant de l’institution policière et de la Ministre de l’Intérieur elle-même persistent. Nous demandons que tous ces écrits soient rectifiés, et, en particulier, qu’un correctif soit publié au Journal Officiel, sur la réponse écrite produite le 16 septembre 2008, rétablissant l’exactitude des faits établis par les enquêteurs eux-mêmes.
Dans l’attente de votre réponse, qui tiendra compte, nous l’espérons, au delà du cas particulier des dégâts humains du 27 novembre 2007, des problématiques générales d’un maintien de l’ordre sécurisant et non sécuritaire, respectueux de la légalité républicaine, de la déontologie et des droits à manifester des citoyens, nous vous prions, Messieurs, Madame, de recevoir l’expression de nos sentiments citoyens.
Grâce au soutien actif de nombreux citoyens et des organisations syndicales du département, de plusieurs députés et sénateurs de Loire-Atlantique - Messieurs Dominique Raimbourg, François de Rugy, François Autain et Madame Marie-Odile Bouillé - une troisième procédure est en cours depuis le 10 juillet dernier, avec la nomination de deux juges d’instruction nantais et l’ouverture d’une information judiciaire contre X sous le chef de coups et blessures volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieur à 8 jours, avec la circonstance que les faits ont été commis avec armes et par une personne dépositaire de l’autorité publique. Dans ce nouveau développement de l’enquête sur les violences du 27 novembre 2007, qui ont blessé notre fils, mais également d’autres manifestants, nous sommes accompagnés par nos deux avocats, Maître Franck Boëzec à Nantes et Maître Nathalie Senyk à Paris.
Un an après, et compte-tenu des éléments nouveaux apportés par les enquêtes IGPN et CNDS, ainsi que les sources citoyennes [groupe de travail 27 novembre, organisations syndicales et section nantaise de la Ligue des Droits de l’Homme], nous souhaitons revenir sur les différentes éléments de la communication policière depuis les premiers jours : ses approximations, ses dénégations, ses mensonges, contre les faits et contre la réputation des personnes.
La police nationale a communiqué de trois manières différentes sur cette affaire :
- À chaud, dans les jours qui ont suivi la manifestation, auprès de la presse locale, en complément des communiqués de la Préfecture et du Rectorat. Nous avons étudié la revue de presse et mis en ligne une synthèse de celle-ci, nous constatons que les propos policiers varient, nient, dénigrent et justifient des faits eux-mêmes flottants, dans une communication à la fois mal maîtrisée et très agressive.
Le détail de cette analyse est consultable sur le site http://27novembre2007.blogspot.com
- Début 2008, en réponse à des lettres des citoyens nantais qui avaient écrit au Premier Ministre, François Fillon, pour protester contre les violences et les gardes vues punitives du 27 novembre 2007, deux policiers ont rédigé des courriers. Yves Monard, Contrôleur Général de la Police Nationale, Directeur Départemental de la Sécurité Publique de Loire-Atlantique le 3 mars 2008, et Éric le Douaron, Directeur des services actifs de la Police Nationale, chargé de la Direction centrale de la sécurité publique au Ministère de l’Intérieur, le 29 février 2008.
Si le courrier d’Yves Monard, responsable départemental, apparaît approximatif, il présente aussi un caractère diffamatoire en affirmant un élément nominatif totalement absent de l’enquête IGPN, enquête dans laquelle il est pourtant interrogé à plusieurs reprises.
Le courrier d’Éric le Douaron, responsable national au Ministère de l’Intérieur, fait l’objet d’une sévère mise en cause par la CNDS : « devant l’extrême gravité de ces blessures, dont les séquelles prévisibles sont particulièrement invalidantes puisque M. P.D-L. ne récupérera jamais sa vision de l’œil droit, la Commission déplore l’imprudente précipitation, dénotant en outre un manque de suivi patent du dossier du directeur central de la sécurité publique, qui, dans une lettre du 29 février 2008, a écrit de manière péremptoire « qu’en aucun cas [M. P.D-L.] n’a perdu l’usage de son œil, étant seulement touché à l’arcade sourcilière », alors que trois mois après les faits, la nature de la blessure de M. P.D-L., était notoirement connue, puisque deux certificats médicaux en date des 28 novembre 2007 et 21 février 2008 faisaient déjà état d’une atteinte traumatique de l’œil droit, de son segment antérieur et surtout de sa pupille. »
Ces deux courriers sont consultables sur le site http://27novembre2007.blogspot.com
- En septembre et novembre 2009, en réponse à trois questions écrites de Messieurs les Députés de Loire-Atlantique, Dominique Raimbourg et François de Rugy, questions publiées au Journal Officiel respectivement le 8 et le 15 juillet 2008, pages 5820 et 6073. Bien que les deux premières questions écrites ne portent pas sur les mêmes éléments, Madame la Ministre de l’Intérieur, de l’Outre-Mer et des collectivités territoriales produit une seule et même réponse, publiée donc deux fois le 16 septembre 2008, page 8052 et 8053 du Journal Officiel. La réponse de la Ministre, qui commence par un bref exposé des nouvelles conceptions du maintien de l’ordre appuyées sur de nouvelles armes, se termine par une accumulation de contre-vérités et de mensonges grossiers, que la lecture du rapport d’enquête IGPN, des avis et recommandations de la CNDS, de la presse locale ou nationale, du dossier d’enquête citoyen et des témoignages recueillis par la LDH remis aux enquêteurs et aux juges d’instruction, infirme totalement et définitivement.
La Ministre de l’Intérieur justifie d’abord l’action policière par l’envahissement des locaux du rectorat, de graves dégradations et des menaces pour la sécurité des personnes. Ces trois affirmations totalement mensongères, sont, pourrait-on ajouter, écrites en dépit même des éléments fournis par la police. La Ministre affirme ensuite qu’il y a eu des violences graves commises contre les policiers. Cette affirmation est également mensongère et absente de tous les éléments liés à l’enquête.
Dans sa réponse à la troisième question écrite, portant plus précisément sur le droit de manifester des mineurs et les préconisations policières relative à la protection des mineurs en manifestation, réponse publiée au JO le 18 novembre 2008, page 9984, la Ministre réitère des affirmations sans aucun rapport avec les éléments de l’enquête : une cinquantaine d'individus s'en prirent violemment aux policiers, dont dix furent blessés. L'interpellation des fauteurs de trouble et auteurs de violences était décidée.
Les questions écrites des députés nantais et les réponses de la Ministre de l’Intérieur sont consultables sur le site http://27novembre2007.blogspot.com
Au delà de la communication à chaud, des courriers subalternes, mensonger ou diffamatoire, nous nous étonnons que la Ministre de l’Intérieur en personne, manifestement mal informée et mal entourée, puisse participer à la diffusion de fausses nouvelles au sein même de l’Assemblée Nationale et du Journal Officiel, contredisant les données élémentaires de l’enquête policière.
Tous ces éléments traduisent, à notre sens, l’inquiétante dérive de l’institution policière en matière de communication externe, vis-à-vis des citoyens, des élus et des médias, d’un climat agressif et manipulateur,
En ce qui nous concerne, nous tirons deux enseignements de cet état calamiteux de la communication policière, en France, en 2008, dans une affaire de violences sur des jeunes manifestant-e-s pacifiques, dont de nombreux mineur-e-s.
Concernant la suite de la procédure judiciaire elle-même
Il nous apparaît impossible que la suite de l’enquête soit confiée à la police nantaise. Au vu de sa communication récente comme d’antécédents récents en cette matière [affaire du policier tué par un collège au commissariat central en octobre 2004, affaire de la disparition de Taoufik El Amri en novembre 2006], il apparaît que la police nantaise ne peut valablement enquêter sur elle-même.
Nous demandons à ce que les services de gendarmerie soient chargés des éléments d’enquête décidés par les deux juges d’instruction.
Concernant la rectification des écrits mensongers ou diffamatoires
Il nous apparaît qu’il est totalement anormal que des écrits mensonger ou diffamatoire émanant de l’institution policière et de la Ministre de l’Intérieur elle-même persistent. Nous demandons que tous ces écrits soient rectifiés, et, en particulier, qu’un correctif soit publié au Journal Officiel, sur la réponse écrite produite le 16 septembre 2008, rétablissant l’exactitude des faits établis par les enquêteurs eux-mêmes.
Dans l’attente de votre réponse, qui tiendra compte, nous l’espérons, au delà du cas particulier des dégâts humains du 27 novembre 2007, des problématiques générales d’un maintien de l’ordre sécurisant et non sécuritaire, respectueux de la légalité républicaine, de la déontologie et des droits à manifester des citoyens, nous vous prions, Messieurs, Madame, de recevoir l’expression de nos sentiments citoyens.