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lundi 27 juillet 2009

Article du Figaro le 14 juillet

14 juillet : « La Figaro.fr »

Le Flash-Ball en question après des heurts à Montreuil
par Christophe Cornevin

Lundi à Montreuil, les policiers ont dispersé une manifestation pour protester contre «l’usage excessif de la force».

Un jeune homme a perdu l’usage d’un œil après avoir essuyé un tir au visage. Une enquête de l’Inspection générale des services est ouverte.

L’emploi du Flash-Ball se retrouve au cœur d’une polémique au lendemain d’incidents ayant éclaté à Montreuil-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis. L’affaire trouve son origine mercredi, lorsqu’un squat niché depuis six mois dans une clinique radiologique du quartier Croix de Chavaux est évacué par les policiers du Raid, sur ordre du préfet. En guise de protestation, des manifestants ont appelé à une «grande bouffe» aux abords avant de vouloir réinvestir les lieux le jour même.

Lors de heurts avec les forces de l’ordre, Joachim Gatti, 34 ans, a perdu l’usage d’un œil après avoir vraisemblablement essuyé un tir de Flash-Ball. Une quinzaine de policiers de la sécurité publique ont déjà été entendus par l’Inspection générale des services (IGS, «police des polices») dans le cadre de cette affaire. Présenté comme proche de la «mouvance autonome», Joachim Gatti est le petit-fils d’Armand Gatti, poète et dramaturge, ancien prix Albert Londres qui dirige l’association culturelle La Parole errante.

Lundi soir, quelque 300 manifestants, selon une source policière, ont manifesté à Montreuil pour dénoncer un «usage excessif de la force». Vers 20 heures, une cinquantaine d’inconnus impatients d’en découdre se sont casqués avant de tirer des mortiers de feu d’artifice et des cocktails Molotov. «Stoïques, les forces mobiles ont essuyé des jets de projectiles, de chaises et de peintures pendant une demi-heure avant de mener des charges en queue de manifestation», explique un policier.

L’ordre de riposter a été donné après les jets de boules de pétanque, bâtons et autres pavés. Des manifestants ont été plaqués au mur et les gaz lacrymogènes employés. Le calme a été rétabli vers 21 heures, après qu’un commissaire eut été blessé à une pommette et un gendarme mobile légèrement à la cuisse.

Strictement encadré

Soutenant que «la police a cherché à disperser la manifestation alors que celle-ci se déroulait dans le calme», Dominique Voynet, maire de Montreuil, a déclaré que le tir ayant blessé Joachim Gatti «aurait été enclenché sans viser». De son côté, la préfecture se refusait mardi à tout commentaire, «dans un souci d’apaisement».

S’il est quotidien, l’usage du Flash-Ball, aussi appelé «lanceur sublétale de balles de défense», demeure strictement encadré. «Dès qu’un tir est à l’origine d’une blessure sérieuse, une enquête est déclenchée par la police des polices», rappelle un commissaire. Dès 1995, le Flash-Ball a équipé les brigades anticriminalité puis les unités engagées en zone sensible. Considéré comme une «arme intermédiaire entre la parole, premier moyen d’action du policier, et l’usage ultime de l’arme à feu», le «lanceur de balles de défense» ne peut s’employer qu’en état de légitime défense ou de nécessité absolue, face à un attroupement hostile ou lors d’une mutinerie.

«Semblables à des balles de jokari, les projectiles lancés par deux tubes superposés doivent en théorie neutraliser une personne violente sans la blesser grièvement», précise un spécialiste.

Précisant la doctrine d’emploi du Flash-Ball en février dernier, une note de la Direction générale de la police nationale interdit les «tirs à moins de sept mètres, sauf circonstances exceptionnelles liées aux conditions de la légitime défense». Par ailleurs, le policier habilité à s’en servir a ordre de «tirer en dessous des épaules».

Sachant que ce dernier vise au jugé et que la trajectoire devient imprécise au-delà de 15 mètres. Dotée d’une nouvelle génération de lanceurs de 40 millimètres à plus longue portée, la police va bientôt suivre en temps réel l’usage de ces armes sur le terrain. Une manière d’affiner la salve.